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28 décembre 2022 3 28 /12 /décembre /2022 23:47

 

Le 17 juillet, mon frère Maurice est mort après un long parcours de santé particulièrement rude. 😥Il s'est bien battu pour rester en vie, il a gardé l'espoir jusqu'au bout, mais l'embolie pulmonaire en a décidé autrement. Il avait eu des effets pas si secondaires que ça.

 

Il ne voulait pas que l'on prononce devant lui les mots psychiatrie, schizophrénie, santé mentale par exemple. Ca le mettait en colère. Il disait, l'avait dit dès le début, et répété maintes fois : "j'ai pété un câble à cause de la douleur d'un énorme abcès provoqué par une épine d'acacia qui m'est rentré dans le genou". Une épine d'acacia, c'est gros, long et très dur, et je ne pense pas qu'il ait su les recommandations "soulager une piqûre d'acacia" que l'on trouve sur le web maintenant. A la fin, on lit : "et allez, éventuellement, au centre de secours le plus proche". Il avait d'ailleurs été hospitalisé ensuite, comme son genou avait énormément enflé.

 

Le début, c'était à peu près entre 1982 et 1985. Il y a environ 40 ans. Mais à l'hôpital psychiatrique, est-ce qu'on faisait de la bactériologie au bilan d'entrée ? A vrai dire, je n'en sais rien. A l'hôpital psychiatrique, on regarde les symptômes. Et hop, on prescrit un neuroleptique aux personnes délirantes. Bon, c'est peut-être un peu plus poussé que ça… Difficile de savoir. Jusqu'en 2019, avant de voir un article relatant un cas de guérison après un mois d'antibiothérapie, je n'avais pas imaginé que l'on puisse avoir des symptômes de schizophrénie à cause d'un agent infectieux. Une bactérie dans ce cas. Je crois bien qu'en psychiatrie non plus. C'est ce qu'on nomme la schizophrénie infectieuse. J'ai alors commencé à me questionner plus précisément sur le sujet. Auparavant, je me demandais seulement comment la douleur aurait pu provoquer une maladie mentale.

 

Contrairement à d'autres personnes, comme moi par exemple, il n'a pas perdu son travail de technicien pour la maintenance de batteries haute tension du tunnel d'accélération de particules, au CERN. Il aimait évoquer Georges Charpak et il était fier d'avoir parlé avec lui occasionnellement. BTS d'électronique en poche, il était passionné d'électronique, et pas que. Les voitures, Les Rolling Stones, Jimi Hendrix, Les Who, etc. Il aimait son travail, était très consciencieux, méticuleux et, très généreux, il faisait passer l'intérêt général avant le sien.

 

Au bout de quelques années, comme il avait rechuté, on lui a prescrit un neuroleptique retard par injection. Peut-être une dizaine d'années plus tard, en 1999, sa tête a commencé à avoir des mouvements involontaires comme s'il se retournait en arrière et regardait de nouveau devant. Son psychiatre avait affirmé que ça ne venait pas du traitement, disait il. Avec le temps, le mouvement et sa fréquence se sont amplifiés, jusqu'à cela devienne infernal au bout d'un an. Il m'a alors demandé de le mettre en contact avec un neurologue. Il n'en pouvait plus. Dystonie, dyskinésie tardive. Auparavant, ce n'était même pas possible d'en parler. Il se fâchait et se refermait sur lui.

 

Il a dû être mis en arrêt de travail, arrêter de conduire, à son grand regret. Il avait pris l'habitude de ne plus prendre l'autoroute, et de se caler la tête sur la vitre à sa gauche pour maîtriser le problème. Je vous passerai tous les détails, un autre neuroleptique, puis l'hôpital neurologique, les injections de toxine botulique, l'implantation d'électrodes de neurostimulation profonde pour arrêter ça. Difficile à prendre, cette décision, puis donner son accord pour qu'on vous ouvre le crâne afin de traiter un effet dit secondaire. 😞Avoir pu échanger avec des personnes qui avaient été soignées ainsi de mouvements involontaires, de tremblements du Parkinson, cela l'a beaucoup aidé à prendre sa décision. La mise en contact était une contribution du service de neurologie. Oui, le témoignage, c'est important pour oser aborder l'inconnu, et diminuer sa peur. Tout cela a pris plusieurs années. Après l'opération, on l'a vu sourire pour la première fois depuis longtemps.

 

 

Comme si cela n'avait pas été suffisant, plus tard, on lui a diagnostiqué un cancer du poumon, apparemment dû à une exposition à la radioactivité. Il n'avait jamais été fumeur. Il m'a confié avoir parfois dépanné quand même des batteries qui faisaient encore sonner un des compteurs Geiger. Il en avait 3 pour être alerté. Satisfaire l'urgence de fournir du matériel révisé, voire réparé ou bien donner satisfaction aux besoins du service ? Quand on fait passer l'intérêt général avant soi… Bon, je dirai aussi que son appartement (qu'il avait acheté sur plan, quelques années après l'implantation des électrodes) a commencé à présenter des anomalies dont celle de remontées d'eaux usées dans les murs de la salle de bains et des toilettes, qui ont empiré avec le temps. La présence de moisissures dans le bas des placos était évidente, tant par la couleur rouille que par l'odeur. L'ARS n'a pas pu intervenir pour déclarer l'insalubrité, car il était propriétaire, une inspection aurait alors reporté la faute sur lui. Faute au constructeur en fuite, dossier judiciaire étiré en longueurs, donc… C'est la faute à pas de chance. Il a dû finir par accepter de faire les travaux à sa charge en grosse partie, à sa grande déception !

 

Cette année, quand j'ai lu un article qui parlait de champignons trouvés dans des cellules cancéreuses, je n'ai pas noté la référence, j'ai quand même eu un déclic. Je me suis posé la question : les champignons se sont-ils installés sur les cellules cancéreuses ? Ou les champignons sont venus en premier et ont déclenché la cancérisation ? Bon, c'est un peu hors sujet, je le concède.

 

 

Pour vous dire que la stigmatisation en psychiatrie est un vrai cauchemar, lui qui refusait catégoriquement d'aborder le sujet de la schizophrénie d'une manière ou d'une autre, il a laissé croire à certains qu'il avait la maladie de Parkinson, il l'a peut-être même dit. Apparemment, certaines personnes l'ont cru. Il a abondamment parlé de son cancer du poumon ensuite, y compris sur le net. Comme si c'était, je vais dire, un honneur, un soulagement d'avoir une maladie dont on peut parler sans être jugé. Vous pourrez penser que j'exagère, mais je ne pense pas, sincèrement. Et d'ailleurs je le comprends, quand je vois tout ce qu'il a dû subir. J'ai tout fait pour essayer de l'aider jusqu'à demander les avis et conseils de spécialistes que je connais. Et je les remercie de m'avoir répondu. Le cancer du poumon, je ne vais pas vous en parler. Sujet trop sensible, encore plus par le fait de la maladie soignée par neuroleptique, et de toutes les conséquences que cela entraine pour la difficulté du suivi et des soins, tant en communication qu'en interférences médicamenteuses. Sans psychiatre. Puisqu'il n'en voulait plus ! Beaucoup de patience et d'ouverture d'esprit étaient nécessaires pour comprendre. Toujours vérifier dès le moindre doute que le vocabulaire utilisé correspondait bien au trouble décrit. A chaque mot dit pour un autre : "Oh ! On ne va pas chipoter…" Sa formule préférée 😉 Ben si, cela pouvait avoir des conséquences importantes, parfois. J'ai repensé à la publication de Guillaume Fond.

 

Quand j'ai appris sa mort, 2 jours après avoir passé l'après-midi à l'hôpital avec lui, je suis restée sans voix 2 ou 3 jours. Je n'ai pas envie de parler de la suite. Le 27 août, on a dispersé ses cendres, et le soir-même, j'ai décidé que j'allais répondre à l'appel à posters du Congrès Français de Psychiatrie, même si ça ne m'était pas adressé. Et le 31 août 23h59, j'ai cliqué sur "Envoyer" pour soumettre mon poster.

 

Place et responsabilités du psychiatre dans le parcours de rétablissement du patient.

 

Voilà le facteur déclenchant de mon poster. C'est aussi ma façon de lui rendre hommage. Ce poster, je lui dédie ainsi qu'à beaucoup d'autres personnes de mon entourage qui m'ont inspiré pour le faire. Non, ce n'est pas obsessionnel, c'est juste que je ne peux pas rester insensible. C'est pour dire PLUS JAMAIS CA ! J'ai beaucoup attendu pour écrire cet article parce que je n'ai pas pu avant. Il arrive que l'émotion vous jette dans le trouble, dans l'agitation cérébrale. Les mots viennent et retombent. Se rassemblent et repartent… D'autres, déjà assemblés dans des phrases font et refont surface, et puis… Silence radio. Brouillard. etc. Et ça recommence…

 

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Paulette Benetton

Isère, ARA, France

née en 1952

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